Triste de voir détruites les belles pelouses des Invalides, en tout cas il y a autre chose à faire dans la zone que manifester... par exemple aller voir l'exposition Napoléon et l'Europe. Italiens, Allemands, Espagnols, Polonais... argh tout ça pour ça en 1848 ! 

J'ai profité d'un repos ces derniers jours pour relire Le médecin de campagne de Balzac, un peu à part dans la Comédie humaine... et un beau concentré de ce que fut le bonapartisme populaire dans les campagnes. C'est mieux d'avoir lu ce livre avant d'ouvrir ceux de René Rémond ou de Jean-Claude Michéa : le pouvoir de la littérature de Balzac, que Marx déjà saluait.

Quant à Michéa, ses piqûres de rappel sont parfois un peu douloureuses, parfois un peu fortes, mais dans l'ensemble assez salutaires. La dernière que je me suis administrée : Les mystères de la gauche, complément au Complexe d'Orphée (tous deux chez Climats/Flammarion).

Dommage que cet auteur n'approfondisse pas sur un point : "common decency" et sans-culottes. Lire par exemple Sophie Wahnich ou le classique de Daniel Guérin.

De même tous les auteurs "marxistes" ne sont pas à mettre dans le même panier. Quid par exemple de Luxemburg et Gramsci ? Une forte actualité éditoriale des deux, ce n'est pas pour rien.

Pauvrette, oui, puisqu'on la tire à hue et à dia en ce beau mois de mai. A chacun sa Jeanne*, la mienne est en gros celle de Michelet (mais sans être insensible à sa dimension spirituelle, ni à la vision de Péguy).

Les mauvaises blagues sur elle me déplaisent tout autant que son excessive récupération. Et puisque rien ne vaut l'histoire, voici trois bons livres sur le sujet :

- un Dictionnaire Jeanne d'Arc conduit de main de maître(s) chez Bouquins.

- de Colette Beaune, Jeanne d'Arc. Vérités et légendes, qui devrait devenir un classique (Tempus/Perrin).

- Pierre Cauchon. Comment on devient le juge de Jeanne d'Arc, de Jean Favier (Fayard), enfin un livre sérieux sur l'un des "méchants" de l'affaire.

* Voici celle d'Olivier Bramanti (Carabas).

Un très beau lieu, même si la salle immense ne se prêtait pas forcément très bien à la présentation d'une partie des pièces (je pense notamment à l'éclairage d'une photographie "passée" représentant Ingres). Une exposition auparavant montée en Vendée. A voir si l'on passe par Laval... notamment si l'on apprécie la lecture de Zola, des frères Goncourt ou de Charles-Louis Philippe.

Il y aurait tout un livre à constituer à partir des traces, explicites ou diffuses, du passage de Jeanne d'Arc dans l'oeuvre d'André Malraux. Et puisqu'on parle d'elle à hue et à dia en ce pluvieux mois de mai, voici un peu de la Jeanne de Malraux :

"Nous savons tous, mais nous ne le disons guère, parce que ça fait chiqué, que la patronne de la Libération, c'est Jeanne d'Arc. Celle-là aussi a eu beaucoup à faire. Plus d'armée, plus de roi, plus de France."

in "Non". Fragments d'un roman sur la Résistance (Gallimard) p.103. 

Quand tout est à terre, que le masque des puissants s'est effondré révélant à cru la réalité des choses... l'espoir toujours dans le peuple. La leçon de Michelet, Hugo, Jaurès, Péguy, Bloch... 

A lire concomitamment, pour esssayer de percer un peu plus les voiles du mystère "khmer rouge" : Le piège khmer rouge de Laurence Picq (Buchet-Chastel) et Itinéraire d'un intellectuel Khmer rouge de Suong Sikœun (Cerf). A noter que la nouvelle formule de Communisme* parle aussi des Khmers rouges (chez Vendémiaire).

* Qui aurait dû longtemps s'appeler Anticommunisme pour être honnête sur son contenu. La nouvelle formule éditée chez Vendémiaire sous forme d'une livraison annuelle voit Stéphane Courtois - et ses outrances - singulièrement dépassé par une jeune garde d'historiens bien moins idéologiques et hargneux, et beaucoup plus en quête de compréhension. Des choses passionnantes sur le Komintern en Asie, notamment. Le temps des Furet et Courtois s'efface, c'est ainsi : la Guerre froide est finie ! Je précise que je suis par contre un lecteur attentif de Nicolas Werth.

Je le note ici pour plus tard - ce blog me sert en grande partie de bloc-notes, on s'en doute - le séminaire de Cécile Guilbert (jamais lue encore) sur Saint-Simon*. Intéressant ce qu'elle dit sur Saint-Simon et la Révolution française... cela me fait (un peu) penser à Balzac lu par Marx. 

Un séminaire RDJ auquel j'aurais été content d'assister. Par contre, qui sait, ce dimanche sur la IIIe République...

* Lire et relire ce merveilleux petit duc bien sûr... et pourquoi pas l'agréable essai de Jean-Michel Delacomptée ? Tout cela chez Gallimard.

Quelle question, ainsi posée ! 

J'y étais en tout cas, entre deux passages à la Fête de Lutte Ouvrière : au Séminaire de la revue La Règle du Jeu consacré à la IIIe République. A l'occasion de la sortie de ce gros livre collectif, à La Découverte, faisant le point sur la recherche.

Passionnant en tous points, l'ami avec qui j'y assistais et moi-même étions suspendus à leurs lèvres. Notamment sur la question complexe du rapport entre les ouvriers et la République (c'est un des thèmes des Mystères de la gauche de Michéa, chez Climats), de l'acculturation républicaine, etc.

Un seul regret : on aurait pu développer davantage sur "Ferry-Tonkin" et consorts colonialistes républicains. Mais c'est que cela mériterait un séminaire à soi seul ! Pas inutile à lire sur le sujet : La politique coloniale. Clémenceau contre Ferry (Magellan & Cie) et La question coloniale dans le mouvement ouvrier en France (les bons caractères). Ou bien la très riche anthologie Marx Engels et la Troisième République 1871-1895 (Editions sociales).

Lecteur de Prochasson et Candar, j'ai pu entendre à cette occasion Gilles Heuré* et Marion Fontaine (elle, par téléphone)... et regretter l'absence de Blandine Kriegel**. 

Quant aux taquineries d'Alexis Lacroix sur le "furetien" Prochasson, la clé se trouve en librairie***.

Parmi les prochains séminaires RDJ, en voici un alléchant : "A-t-on encore le droit de critiquer le capitalisme ?". J'aime beaucoup les écrits de Michaël Löwy mais ne pouvant aller l'écouter en direct, je me contenterai du podcast.

* Drôle de personnage que Gustave Hervé... Heuré lui a consacré un livre à La Découverte.

** Son ouvrage La République et le Prince moderne fait partie de ces livres dont je me dis "je dois l'acheter au plus vite" (et je ne le fais jamais, trouvant toujours autre chose à lire avant).

*** En attendant le livre de Christofferson sur le même sujet... Lorsqu'il sortira, un séminaire confrontant alors les deux sur Furet serait le bienvenu. 

Une belle rencontre du dernier FIBD, Annick K., qui s'en sort plutôt bien avec ses strips sur le site internet de L'Express. Lesquels dépassent la bd simplement dite "girly" par des questionnements, implicites ou non, en provenance des postcolonial studies. 

L'occasion d'un clin d'oeil à tel livre de Daniel Guérin (dont on réédite par ailleurs Bourgeois et bras nus).

Trois bons textes pour mieux situer certain pop-activisme, trois voix différentes "de gauche" sur le sujet préféré des médias (il faut bien nourrir la machine spectaculaire) :

- "Femen partout, féminisme nulle part" de Mona Chollet

- "Quel usage politique de la nudité ?" de Claude Guillon 

- "Pourquoi je n’ai plus foi en les Femen" d'Ovidie

- à la galerie Jean-Marc Thévenet (tout près du Centre Pompidou), finissage de l'exposition "Vers Jung" d'Olivia Clavel. En lien avec la sortie de son album publié par Blanquet, La recherche. Du vrai underground, pas du simili... Ce soir à 18h00. 

- vraiment les tous derniers jours de la Valise mexicaine (au MAHJ)... Avis à tous ceux se trouvant à Paris d'ici dimanche !

- à la librairie lyonnaise Expérience (5 place Antonin Poncet), finissage demain vendredi de l'exposition des planches originales du beau livre de Rachel Deville, L'heure du Loup (L'Apocalypse). A 18h00 aussi.

(quelques doses) 

- Albert Mathiez, La Révolution française, Bartillat.

- Albert Mathiez, La réaction thermidorienne, La Fabrique

- Daniel Guérin, Bourgeois et bras nus, Libertalia

- C.L.R. James, Les Jacobins noirs, Amsterdam

- Albert Soboul, Dictionnaire historique de la Révolution française, PUF

- Sophie Wahnich, La Longue patience du peuple, Payot

- Guillaume Mazeau, Le bain de l'histoire, Champ Vallon

- Claude Guillon, Notre patience est à bout, Imho

- Eric Hazan, Une histoire de la Révolution française, La Fabrique

- Collectif, Pour quoi faire la Révolution, Agone

- Collectif, Robespierre. Portraits croisés, Armand Colin

- A.H.R.F. n°371, "Robespierre"

Je le lis lentement, avec délectation (quelle belle prose) : le Code de la nature de Morelly (La Ville Brûle).

Bien sûr, il est difficile de partager tout le bel optimisme de Morelly, le XXe siècle est passé par là, mais voilà une belle phrase : "Qu'était-il besoin d'aller chercher la dépendance des hommes les uns des autres et la réciprocité des secours dans un expédient aussi pernicieux que l'inégalité de fortune, tandis que la nature en offrait tant d'autres si simples et si merveilleux ?" (p. 74).

Bien des hommes de 1793 avaient lu Morelly... tout en croyant avoir affaire à Diderot comme l'explique Stéphanie Roza* dans son excellente introduction. Lumières radicales... 

* Vivement la publication de sa thèse.

En complément sensible de ce pamphlet sur la situation globale du livre en France, la beauté d'un livre précis. Le regarder, le toucher, le caresser (son cartonné), le sentir, le feuilleter (une très riche iconographie), lisser son signet, le placer, le déplacer. Un ensemble de gestes (en librairie, chez soi...). Que l'on ne peut dématérialiser.

Dans une confrontation récente de points de vue, au titre un peu trop accrocheur, "La Révolution : pour ou contre Furet ?", Politis laissait le dernier (et juste) mot à Sophie Wahnich : "Peut-être de ce fait n'y a-t-il plus à être pour ou contre François Furet, mais simplement à affirmer que la période Furet est historiquement terminée." Et elle-même objet d'histoire, cf la biographie de Prochasson*.

* Ou, d'un autre point de vue, les écrits de Christofferson.

Soit l'Histoire des intellectuels italiens au XXe siècle. Prophètes, philosophes et experts, de Frédéric Attal, aux Belles lettres.

Appétissant gros volume, sans doute en voie de devenir indispensable à de nombreuses bibliothèques, publiques ou privées... mais pourquoi ce gros livre important* n'est-il pas doté de rabats qui le protègeraient si bien sur le long terme ? Dommage. 

Un homme de goût de ma connaissance s'est mis récemment à couvrir (de plastique transparent) certains de ses (beaux) livres : je commence à comprendre pourquoi. 

J'adore cet éditeur et son catalogue, mais fichtre, des rabats... de bons rabats dodus !  

* Par exemple pour comprendre l'effervescence intellectuelle dans laquelle Gramsci a pu penser et écrire. Pour un exemple de cette effervescence, on peut consulter A la fête de la Révolution. Artistes et libertaires avec D’Annunzio à Fiume, de Claudia Salaris (Editions du Rocher), dont voici une bonne critique.

Comme je ne vais à Paris qu'en coup de vent ce week-end et pour la Fête de l'Humanité, immense espace rempli de livres, je vais rater :

- les derniers jours de l'expo Landru au Musée des Lettres et Manuscrits. On m'a dit beaucoup de bien du catalogue.

- Parcours des Mondes, dont de précédentes éditions m'avaient enchanté. L'occasion de découvrir des pièces extraordinaires, très "chargées" pour le dire ainsi, presque inquiétantes. La gazette Drouot donne quelque idée de cette 12e édition dans son numéro 1329.

Me consolerai avec « Guerre et paix, Jaurès et Picasso engagés pour la paix ! ». Et quelques raretés bibliographiques, qui sait ?

Visité au débotté - et après diverses péripéties automobiles - une fort bonne exposition sur "La Croisière jaune", laquelle a réactivé  et réagencé en moi des souvenirs de "La cloche tibétaine".

C'est à Marthon, dans un lieu qui résonne et fait résonner, un lieu restauré avec goût et finesse* et qu'il faut vraiment découvrir en lui-même.

Des dérives psychogéographiques charentaises sont ainsi possibles... je n'en doutais pas, mais il est bon de le vérifier.

C'est donc "Expédition Citroën Centre-Asie. 1931-1932 : de Beyrouth à Pékin", photo, dessins, documents, film etc. à la Tour Saint-Jean de Marthon.

Comme je venais de lire Parmi la jeunesse russe d'Ella Maillart (dates, lieux, regard...), j'étais au bon endroit, au bon moment (et en bonne compagnie).

* Heureusement, Viollet-le-Duc est mort, paix à son âme comme on dit.

Acheté Lui pour lire dans le train hier (avec L'Humanité, il fallait voir comment ces deux lectures intéragissaient)... j'en parlerai peut-être plus avant ici même. En attendant, cette voiture très particulière. Ben oui, une mitrailleuse, rien de tel pour écraser "la canaille" qui ne se contenterait pas de courir derrière en réclamant des piécettes. Si le Don Salluste du film avait eu ça ! Les tigres ont bon dos.

Une bonne lecture pour le train... et aussi pour se tenir au courant, La Gazette Drouot. Une vieille dame de papier, mais qui semble bien se porter.

Tout à la fois un outil professionnel, un réceptacle à fantasmes divers et une source iconographique surprenante. On ne sait en effet jamais, numéro après numéro, ce que l'on va trouver, parmi les objets, tableaux, armes, sculptures... Du pire et du meilleur ? C'est là tout l'intérêt. 

Je recommence à faire des salons, je me reconnecte un peu au monde de la bande dessinée, après l'avoir laissé de côté pour me consacrer à mon (premier) roman. Lequel n'est pas fini, mais bientôt.

Donc, si quelqu'un veut passer me voir, ou regarder mon travail en papier, ces deux dates-là : 

- Colomiers les 15, 16 et 17 novembre, à côté de Toulouse (pas mal de copains y seront... ça encourage) / présence confirmée durant tout le salon.

- SO BD les 29, 30 novembre et 1er décembre, à Paris IVe (Catel et Boquet "invités d'honneur"... avec leur Olympe de Gouges) / présence... annulée en fait.

J'y serai avec les éditions Scutella, pour Univoco Furioso, mon album avec Tib-Gordon. 

Au cher vieil ami des années héroïques, mille pardons ! Toujours rien lu de Jørn Riel, et ses livres doivent prendre la poussière quelque part. Toutefois, grâce à Gwen de Bonneval et Hervé Tanquerelle, une possible session de rattrapage, due à un choc ursin matinal : cette couverture pour laquelle il faudra bien sauver la banquise ! En général peu "fan" des adaptations, mais quand on sait qu'on ne lira probablement jamais tel ou tel livre, ma foi...

Moi qui cherchais des choses bien à faire à Bordeaux... en voici une : l'exposition "Jean Moulin. Le devoir de la République" au Musée d'Aquitaine. C'est jusqu'en mars 2014 mais l'on peut prendre un peu d'avance dès cet automne. Et si le nom de Jean Moulin pouvait résonner en nos temps troublés, ce ne serait déjà pas si mal.

Cela se passe quelque part en Vendée, le dessinateur PieR Gajewski y expose ce week-end, mais ne me demandez pas où c'est précisément. J'aime bien Cholet mais connais peu ses environs.

Le co-auteur de l'énorme projet "cosmopolitique" La Ville Bleue* (avec la photographe et réalisatrice Carole Sionnet) y montrera les dessins illustrant L'Empereur Hon-Seki (Le Corridor bleu).

Une occasion de découvrir le travail original de l'auteur, transcripteur d'une certaine angoisse des métropoles contemporaines. En voici une autre (occasion).

* L'exposition Europa marqua les visiteurs en son temps à Angoulême. Le local et l'universel, une dialectique indispensable.

On vient de me l'offrir... et même si je connais ces textes, je suis content : car tout est dans leur imbrication. Rendre le peuple heureux, donc, avec Saint-Just et les éditions La Fabrique. Car c'est vraiment ce qui fut tenté avant Thermidor et que l'on ne sait plus voir. Trop de lumière, peut-être ?